« « Il faudra bien qu’on s’en rende compte », dit Delphine dans sa robe délavée, trop courte au-devant, pendante à l’arrière, gonflée de ce ventre qui ne cesse de se tendre. Il faudrait bien aussi qu’elle se rende compte qu’elle s’essouffle pour l’homme qui la fuit, qui ne peut recevoir l’amour qu’elle porte pour lui. Dans la petitesse de la grande ville, ses pas perdus croisent ceux de Stéphane et Édouard, spectateurs impuissants de sa course folle. Saisi malgré lui de pitié pour Delphine, Édouard tente de se remémorer cette enfant abandonnée à sa fatigue et à sa folie, dévorée par le souvenir d’une grand-mère protectrice, errant de sauveur en sauveur jusqu’à se perdre. La prose sensible et saccadée d’Anne Hébert affleure la douleur de ces êtres et en restitue la beauté. »